Les Américains et l'obsession pour le service

Je suis actuellement en voyage aux États-Unis, à Chicago. Sur X, j'avais beaucoup entendu parler des Américains accros à toute sorte de services qui se plaignaient lors de vacances en Europe que nous n'accordons pas autant d'attention qu'eux aux services.

L'exemple le plus connu est la restauration : aux États-Unis, le serveur est aux petits soins pour les clients afin d'obtenir son pourboire.

Les Américains sous-traitent tout, c'est une autre philosophie de vie.

Il y a des voituriers partout dans les restaurants. Ils préfèrent payer une vingtaine de dollars pour faire garer leur voiture plutôt que de le faire eux-mêmes. En France, ça n'existe que dans les grands restaurants de luxe. À Chicago, dès qu'il s'agit d'un restaurant de standing, il y a un voiturier. C'est aussi quelque chose qui existe dans les immeubles. Un voiturier est embauché par la copropriété pour garer le véhicule des habitants. Et, comme pour les restaurants, il ne s'agit pas de cas exceptionnels.

Je cherchais une salle de sport en centre-ville pour m'entraîner pendant mon séjour. À ma grande surprise, c'est très difficile d'en trouver. Je m'attendais à en avoir une à tous les coins de rue.

Mais non, les Américains préfèrent les petits studios de coaching privés plutôt que de payer un abonnement à une salle de sport classique et d'aller s'entraîner quand ils le souhaitent. Ça doit coûter une fortune pour faire les mêmes exercices qu'ils feraient à la salle de sport.

Les Américains font ça dans tous les domaines, par exemple, embaucher quelqu'un pour promener leur chien est très courant alors qu'en Europe c'est inexistant.

J'ai même vu un agent de sécurité devant la cour de récréation d'une école — comme si l'enfant du président était là.

Aux États-Unis, payer quelqu'un pour entretenir son jardin, c'est classique. En Europe, embaucher quelqu'un pour faire le ménage est déjà rare, alors pour le jardin encore plus.

Quel pourrait être l'impact sur la société

La facilité d'emploi

Avec ces millions de petits jobs qui existent, il doit être plus facile de trouver un travail quand on est dans la galère ou tout simplement pour arrondir ses fins de mois.

Au contraire, quand ce genre de boulot n'existe pas, le marché de l'emploi devient très rigide.

La rigueur

Aux USA, il n'y a ni chômage ni RSA. Il faut gagner son argent soi-même. Avoir tous ces jobs à disposition permet de se forger la rigueur du travail plutôt que d'attendre son allocation à la fin du mois, qui favorise l'oisiveté. Ces jobs sont mal payés et sans perspective d'évolution. Cela motive à travailler plus et à prendre des risques pour obtenir un meilleur job et un meilleur salaire.

Le cercle vicieux

Quand tu consommes tous ces services, il te faut beaucoup de revenus — tu ne peux pas rester sur tes lauriers et te la couler douce — car, si tu n'as plus d'argent, tu ne peux plus utiliser tous ces services.

Nous n'avons pas ce problème en France, nous n'avons « d'obligatoire » à payer que le loyer, les petites factures et la nourriture. Perdre en revenus a beaucoup moins d'impact dans ce cas puisque nos frais sont minimaux.

Mais aux États-Unis, perdre en revenu veut dire ne plus pouvoir garer sa voiture quand on va au restaurant, ne plus pouvoir aller à la salle de sport, ne plus pouvoir sortir car on doit aller promener le chien ou s'occuper de son jardin, etc.

Cela change totalement le rythme de vie. Quand on a goûté à tous ces petits avantages, ça doit être difficile de s'en défaire. Alors ça incite à travailler dur pour garder ce rythme de vie.

C'est vraiment une toute autre façon de fonctionner qu'en France.

Et si cela avait un impact bien plus important sur la société ?

Les États-Unis sont bien plus riches que l'Europe. Peut-être que l'usage intensif de divers services a une grande incidence sur cette richesse produite ?

Se délester de toutes ses petites tâches qui nous encombrent a peut-être bien plus d'importance que ce que l'on imagine.

Ce sont plein de petits stress en moins : ne pas avoir à trouver une place pour sa voiture, ne pas avoir le temps de promener son chien après une journée de travail plus longue que prévu, ne pas avoir à réfléchir à quels exercices faire pour se maintenir en forme, etc.

Avoir l'esprit plus libéré de ces tâches nous permet peut-être de décupler notre productivité au travail. À l'échelle d'un pays, cela peut représenter quelques points de PIB.

L'autre aspect intéressant est que l'argent circule beaucoup plus vite dans l'économie et surtout localement.

Quand tout le monde utilise divers services, l'argent bouge très vite et enrichit tout le monde. Quand tu paies un voiturier pour garer ta voiture au restaurant, celui-ci habite dans ta ville, sûrement à moins de 30 minutes de chez toi.

Celui-ci va à son tour payer quelqu'un pour promener son chien lorsqu'il travaille sur un gros week-end.

À son tour, le promeneur de chien va faire appel à un livreur quand il va commander à manger sur Uber Eats.

Dans une grande ville comme Chicago, l'argent tourne indéfiniment comme ça et enrichit tout le monde.

Conclusion

De notre point de vue européen, on critique beaucoup les Américains pour fonctionner ainsi. Ils gèrent mal leur argent et le dépensent dans des choses futiles.

Mais je pense que ce fonctionnement à l'opposé du nôtre a de nombreux points positifs. Nous aurions sûrement intérêt, nous Européens, à nous en inspirer.